Lauréat du prix Raymond-Gervais 2014
Catégorie Collégial – universitaire
Allocution prononcée lors de la remise du prix
Notre lauréat 2014 dans la catégorie « collégial-universitaire » n’est malheureusement plus parmi nous. Il nous a quittés il y a quelques années, mais son héritage continue de vivre à travers l’action de très nombreux enseignants en science et technologie du secondaire, car il a longtemps été impliqué en formation des maitres et a insufflé une énergie et un bagage scientifique considérables qui continuent encore chaque jour d’avoir des effets positifs sur les élèves dans nos classes. Le choix des anciens lauréats du Prix Raymond-Gervais s’est cette année arrêté sur Monsieur Armel Boutard, professeur de physique à l’UQAM.
Décédé en aout 2008, le professeur Armel Boutard, du Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère, enseignait à l’UQAM depuis 1970. Membre fondateur de l’Institut des sciences de l’environnement de l’UQAM, il a été à l’origine de plusieurs programmes d’études, notamment en sciences de l’atmosphère, en environnement, en ressources énergétiques et en génie microélectronique.
Avec un diplôme de génie physique de l’INSA-Lyon en poche, Armel Boutard est arrivé au Québec au milieu des années 60. Il obtient par la suite une maitrise en physique des plasmas et un doctorat en physique nucléaire de l’Université de Montréal. Puis, il est embauché au Département de physique de l’UQAM et en devient le directeur en 1971.
Dans les années 90, il codirige un projet France-Québec sur l’agriculture péri-urbaine – volet environnement. Il s’implique également avec la Faculté des sciences de l’éducation dans des projets de l’Agence Canadienne de développement international (ACDI), dont le projet EDAMAZ (EDucacion AMbiental en AmaZonia) (1993 à 2001), qui vise la formation de formateurs en environnement en Colombie, au Brésil et en Bolivie. En 2007, il fait partie du projet Ecominga Amazonica qui vise la formation de leaders communautaires en écodéveloppement axé sur l’eau et l’alimentation en Bolivie. À l’international, il a aussi collaboré aux travaux du Centre d’études et de recherche en environnement de Conakry et au projet de formation environnementale de l’Université de Port-au-Prince en Haïti.
Ses interventions avec des étudiants de toutes origines et de toutes disciplines, ainsi qu’avec des enseignants en formation initiale et continue ont été nombreuses, fertiles et toujours inoubliables. D’innombrables membres de l’AESTQ ont été formés par lui et continuent de diffuser son héritage.
Encore aujourd’hui, il est possible de trouver des « fragments et regards » témoignant de la vie professionnelle de Monsieur Boutard, et disponibles sur le web (Consultez http://www.centrere.uqam.ca/public_html/site_archive/armel/index.html) ». Ses étudiants reconnaitront les contenus et connaissances, scientifiques, mais aussi humains, qui remplissaient ses cours et étaient toujours présentés d’une manière inattendue et dans la bonne humeur.
Allocution de Lucie Sauvé à l’occasion de la remise du prix à Trois-Rivières, le 23 octobre 2014
LS- « Je suis vraiment très émue de cet hommage rendu à Armel Boutard, qui a été mon compagnon et mon collègue pendant 20 ans. En son nom, je remercie l’Association pour l’enseignement de la science et de la technologie du Québec pour cette marque de reconnaissance de sa longue trajectoire de plus de 35 ans comme producteur et médiateur de savoir scientifique au département de physique, puis au département des sciences de la terre et de l’atmosphère de l’UQAM. Armel aimait affirmer son identité de physicien et il rappelait souvent les années marquantes de sa formation à l’INSA (Institut national de sciences appliquées) de Lyon.
Il avait cet art inégalé de donner du sens aux savoirs de faire des synthèses inédites, efficaces, d’associer science et technologie, de relier la physique et la métaphysique.
Il a été un pionnier des sciences de l’environnement au Québec et à l’UQAM en particulier. Il a structuré le champ nouveau de la physique de l’environnement et il a créé ou contribué à créer sept programmes de formation interdisciplinaires, entre autres, la maitrise et le certificat en sciences de l’environnement, le certificat en sciences et technique de l’eau, le certificat en énergies nouvelles, le baccalauréat en sciences, techniques et société. Il a aussi ouvert le champ des sciences de l’atmosphère. C’est ensemble qu’on a développé le programme court de 2e cycle en éducation relative à l’environnement. Armel Boutard a enseigné à plus de 3000 étudiants dans les divers programmes de sciences à l’UQAM. Je pense qu’aucun ne l’a oublié. Il était un professeur marquant, engagé, attentif, lumineux, plein d’humour aussi.
Pendant plusieurs années, il a aussi fait de la formation en environnement auprès de différents publics, dont les maires des MRC à travers tout le Québec. Il a fait de la formation dans les alumineries, les papetières et autres entreprises. Armel avait le grand art de savoir rejoindre les gens, là où ils sont, avec leur désir d’apprendre quelque chose qui ait de la signification pour eux. Il a fait de la formation auprès des dirigeants d’entreprises comme auprès d’ouvriers analphabètes, qui n’avaient pas besoin de crayon ou de formules pour comprendre l’essentiel des réalités qui les concernaient et pour avoir envie de continuer d’apprendre et de s’engager. Armel savait s’adresser à chacun, il savait valoriser le savoir et l’expertise de chacun et donner le gout d’apprendre davantage.
Il est né dans une petite auberge de campagne au cœur de la France. C’est sans doute un peu/beaucoup de là qu’il avait appris à dire Bonjour! Savoir dire bonjour à l’autre, c’est la première chose qu’il faut apprendre en pédagogie – c’est Riccardo Petrella qui l’a souligné. Armel savait dire Bonjour, avec engagement. Il savait accueillir et puis offrir. Armel était devenu l’aubergiste du savoir. Il aimait les étudiants et les accueillait. Il préparait chaque cours avec attention comme si c’était la première fois. Il savait apprêter la science et lui donner du sens. Il était devenu le magicien de l’infiniment petit, de l’infiniment grand, de l’infiniment complexe. Il s’inquiétait aussi beaucoup de l’infiniment préoccupant, comme il le disait – en matière d’environnement. J’aurais tellement voulu qu’il soit là avec nous, en ce moment, pour partager la lutte contre l’invasion des hydrocarbures au Québec, et promouvoir l’alternative énergétique, comme il le faisait si bien, avec vision, compétence et conviction.
Dans les dernières années, Armel avait eu beaucoup de plaisir à produire des diaporamas électroniques pour ses cours. Avec mon collègue Patrick Charland – qui a aussi été étudiant d’Armel à la maitrise – on a pu mettre ce patrimoine en ligne. On peut donc retrouver les notes de cours d’Armel dans le site de notre centre de recherche, le Centr’ERE, dans la section Archives (voir URL plus haut dans le texte).
Vous verrez qu’en parlant d’énergie, Armel savait aussi parler d’amour.
En son nom, merci encore et encore pour ce bel hommage!